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Le blog de Leïla Babès
29 mai 2008

Redeker

 

 

Libération

Rebonds


Islam : réponse à Robert Redeker

 
Leïla Babès professeure de sociologie des religions à l’université catholique de Lille.

 

QUOTIDIEN : jeudi 29 mai 2008

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Invité dans l’émission de France 2 On n’est pas couché du 17 mai, vous avez reproduit, à peu de chose près, le contenu de l’article publié par le Figaro (19 septembre 2006) et qui vous avait valu une condamnation à mort sur Internet. A l’époque des faits, le choc produit par les menaces qui pesaient sur vous, et l’urgence de la mobilisation contre cette atteinte à la liberté d’expression, me paraissaient plus importants qu’une réponse dont, de surcroît, je n’aurais souhaité pour rien au monde qu’elle fût interprétée par vos détracteurs comme un témoignage à charge. C’est pourquoi je m’étais bornée à intervenir sur votre site pour expliquer en quelques mots les raisons de mon soutien, et mon désaccord avec le contenu de votre brûlot.

Il est temps à présent que l’on ouvre le débat, moins pour vous répondre que pour poser les questions qui font cruellement défaut dans le tissu de poncifs qui vous tient lieu d’analyse. A commencer par l’idée que les «musulmans modérés» ne vous ont pas assez soutenu. Voilà bien un qualificatif insultant, consacré par toute une vulgate médiatique qui s’interroge régulièrement sur le silence des «modérés», cette poignée de musulmans noyés dans le milliard d’extrémistes, tout juste assez civilisés pour être capables de répondre sans chercher à exterminer l’autre. J’en ai plus qu’assez d’entendre cette rengaine, lorsque ceux-là mêmes qui n’invitent que des prédicateurs islamistes, au mépris de tous les autres courants de l’islam, s’étonnent de ne pas nous entendre. Lorsque j’ai signé la pétition de soutien, je ne l’ai pas fait en tant que musulmane «modérée», mais en tant que citoyenne convaincue qu’aucune critique, fût-elle blasphématoire - pour parler comme ceux qui instrumentalisent les religions pour nous intimider -, malhonnête ou ignorante, ne mérite de valoir à son auteur une condamnation. La critique radicale de l’islam - et pas seulement de l’islamisme - est un exercice auquel je me livre périodiquement dans mes chroniques à Médi1, radio franco-marocaine écoutée par des millions de Maghrébins. Vous voyez, je n’ai rien d’une «modérée».

Si au lieu de vous contenter de lancer des stéréotypes du genre «christianisme = religion de l’amour, islam = religion de la haine», vous aviez sérieusement soumis votre objet de détestation à la critique rationnelle dont vous vous piquez en vous comparant à Voltaire, vous auriez peut-être évité de comparer le prophète de l’islam à Hitler. Ce qui, au-delà de toute considération religieuse, est une niaiserie et un non-sens épistémologique surprenant de votre part. Mais vous avez décidé que l’islamisme est définitivement l’islam, comme le prouve votre article qui porte en son titre le premier terme alors que l’ensemble du texte ne parle que du second. Vous me pardonnerez d’ajouter que les islamistes sont décidément bien bêtes de condamner quelqu’un qui apporte de l’eau à leur moulin. Bien entendu, vous avez raison de dénoncer le chantage à l’islamophobie, la ségrégation des sexes et le soutien apporté par des courants gauchistes aux islamistes, qu’ils considèrent comme les nouveaux damnés de la terre. Le problème est que vous rabattez tous ces faits sur une vision essentialiste et culturaliste de l’islam, que vous désignez comme l’ennemi de la civilisation. Vous pouvez bien vous défendre d’attaquer les musulmans, vous ne faites pas autre chose lorsque vous les comparez aux adeptes de Hitler qui suivent leur chef (Mahomet). Lorsque vous parlez de l’islam qui «tente d’obliger l’Europe à se plier à sa vision de l’homme», vous me paraissez hélas plus proche de Geert Wilders et d’Oriana Fallaci que de Voltaire, et certainement pas de l’islamologue Maxime Rodinson que vous citez dans votre article pour étayer votre maigre savoir sur l’islam.

Vous vous essayez au comparatisme dans une vision binaire séparant le christianisme, sécularisé, qui fait toujours passer l’autre avant lui, de l’islam, qui «tient la générosité, l’ouverture d’esprit, la tolérance, la douceur, la liberté de la femme et des mœurs, les valeurs démocratiques, pour des marques de décadence». Le seul constat qui s’impose face à un tel concentré d’inexactitudes qui mêle théologie, préjugés et événements contemporains, de cette lecture grossière du choc des civilisations, est que l’historicité est le moindre de vos soucis. C’est oublier (ou ignorer ?) que la sécularisation s’est d’abord construite contre la religion, qu’elle a soumise à n’être rien d’autre qu’une confession. Vous dites que «le retour à Jésus est un recours contre les excès de l’institution ecclésiale. Le recours à Mahomet, au contraire, renforce la haine et la violence. Jésus est un maître d’amour, Mahomet un maître de haine.»

Le problème est qu’au lieu d’ouvrir un débat serein sur la question de la violence dans l’islam, vous ne faites qu’opposer les deux religions, et ça, c’est violent. Il est dommage que les quelques vérités que vous rappelez là soient submergées par une vision caricaturale des choses. Un exemple : la figure d’amour et de non-violence de Jésus, non pas celle des Evangiles, mais celle du Coran où il est présenté comme le seul prophète exempt de péché (à part Marie), né du souffle de Dieu. Force est d’admettre qu’à l’exception des courants soufis, la tradition musulmane a escamoté la dimension d’amour de Jésus pour ne retenir de lui que l’image d’un prophète important certes, mais un prophète parmi d’autres, ce qui est loin de correspondre à la place et au statut exceptionnels que le Coran confère au «Fils de Marie».

La question n’est pas d’opposer à votre schéma comparatiste l’argument naïf et contre-productif de ceux des musulmans qui s’indignent en répondant que non, l’islam est une religion de paix et de fraternité et qu’il est détourné de son sens profond par les méchants islamistes, mais de s’interroger sur les causes profondes de la violence, y compris en l’articulant, comme l’a fait Benoît XVI, à la foi. Vous écrivez : «Haine et violence habitent le livre dans lequel tout musulman est éduqué, le Coran». Là, vous dites des sottises, M. Redeker. Ce qui habite les islamistes, ce n’est pas le Coran, qui ne leur sert que de source pour légitimer leurs actes, mais la prédication sauvage qui s’est développée à partir du début du XXe siècle. Je sais de quoi je parle, je descends d’une lignée de théologiens.

Vous avez pris soin, pour expliquer les causes profondes de la violence actuelle, de ne citer que les épisodes les plus troublants de la conscience musulmane, à commencer par le massacre de la tribu juive de Médine, les Qurayza. Nous ne savons que peu de chose de cet épisode inouï, et les raisons d’un tel massacre nous échappent. D’autres que moi vous l’ont certainement dit, si le texte coranique contient des versets de violence, il en contient d’autres qui contredisent cette orientation, comme c’est le cas pour  la Bible. La vraie question aujourd’hui est là : que faire pour empêcher que l’on se serve des sources qui légitiment la violence ? Quels sont les instruments théologiques et politiques qui permettront d’élaborer une charte de paix et de compromis avec l’autre ? 

Ce qui empêche tout aggiornamento, ce n’est pas «la haine qui fonde l’islam dans ses origines», ce sont les despotes qui instrumentalisent la religion comme source de légitimation et comme moyen de censure et de répression de toute velléité d’expression libre et de démocratisation ; ce sont des clergés qui puisent dans les lois les plus régressives - y compris en en détournant le sens - pour perpétuer leur pouvoir ; ce sont, enfin, les islamistes qui entendent faire de la loi religieuse l’unique source de leur projet totalitaire. Ce qui manque, c’est le courage politique de décréter qu’il est interdit à quiconque de recourir aux textes religieux pour justifier la violence, de couper l’herbe sous le pied des terroristes et de tous les islamistes qui les soutiennent en les privant de toute légitimité religieuse. Il est urgent de constituer un comité de sages composé de dirigeants politiques et d’hommes et de femmes de bonne volonté pour établir ce consensus. C’est seulement dans ces conditions, en isolant les sources qui posent problème, en les protégeant même, qu’il sera possible d’entreprendre la réforme tant attendue.

Dernier ouvrage paru :  Le voile démystifié, Bayard, 2004.


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Commentaires
L
Pas le droit d’être français, pas le droit d’être musulman, fait pas ci, dit pas ça… Et si je veux me lancer dans la charcuterie halal, qu’est ce que cela peut faire ? Je massacre l’orthographe ? Et alors ! Devrai-je me taire pour autant ? Cesser de déranger ? Doit-je me lier sur le tuteur républicain ou le mufti de bas étages que certains aimeraient me voir suivre aveuglement. Non je ne m’y résous pas. J’avais quatorze ans et je lisais un article sur les templiers. Saviez vous que dans leurs rites, ils devaient cracher sur un crucifix ? J’ai vite compris que cela devait être pratique durant les croisades, en cas de torture par le maure vengeur.<br /> <br /> Est ce pour cela que je mange de la côte de porc ? Ou par ce que c’est bon ? Les régimes religieux alimentaires, non-merci ! C’est comme faire la queue au guichet du ministère de l’identité. Reste plus qu’à emmerder tout le monde ? Hallah et Mariane ne peuvent pas s’entendre ? Drôle ! Je suis un rat comme les autres sur la surface de la terre, effaçable à tout moment comme tout ce qui est vivant. Au lieu de louer dieu ou le hasard, au lieu de se réjouir de ce miracle, on geint, on pleurniche pour des droits et devoirs que l’homomodernicus a érigé pour sortir des cavernes. Retournons-y ! Nous serons plus à l’abri des météorites et des juges imbéciles.<br /> <br /> Ca me fatiguent toutes ces lignes de conformité, toutes ces exigences tacites et explosives. Je suis français, musulman, libertaire et j’emmerde en long, en large et en travers tous ceux que cela dérange, tous ceux qui voudraient peaufiner mon être et l'enfermer dans un carcan. Le socle républicain ne doit pas être posé sur une fosse des libertés. Cela devrait être un pont entre les êtres humains par-dessus les peurs qui nous submergent aujourd’hui. L’islamisme français n’a rien à voir avec celui qui sévit sur le monde musulman. Ici, ils tiennent les trafiques, vendent les Nike, les caméscopes, et les lecteurs de Divx. Ici, ils vendent de la dope après dix-huit heures trente. Après la rupture du ramadan. Avant c’est pécher...<br /> <br /> Le front n’est pas là. Ici ils ont été achetés et espèrent même ne jamais avoir à payer en retour un tribu de sang à leurs sectes. L’impôt révolutionnaire grève déjà suffisamment leurs profits. Sous le voile de la lutte anti islamistes, on veut nous faire avaler des couleuvres tricolores pour éprouver notre servilité et réduire nos libertés. Les nations sont des bocaux et l’humanité l’océan ! Rien n’est plus étriqué qu’un uniforme nationaliste ou religieux. Il n’y a pas de pire souliers de plomb pour noyer la liberté, l’égalité et la fraternité. Ceux qui parlent de Voltaire pour se gausser d’être français entravent le chemin de son panthéon de l’universel. On ne réduit pas ce qui doit se partager, on ne l’enferme pas dans un orgueil national, on sourit à peine de le voir respecté, adulé. C’est cela le rayonnement de la France et non pas une tranche de camembert dans une baguette molle ou un mauvais pinot de Charente siroté sur le paquebot. Nous sommes là et nous n’avons pas d’efforts à faire pour nous intégrer. Sur le barbecue la chipolata, le boudin noir et la merguez ne se battent pas comme la bible, le code civil et le coran. Sur une étagère, les livres restent sages. Dociles sous la flamme, tous disparaissent pour nos appétit.<br /> <br /> Nous ne sommes pas fait d’éther et nous avons trouvé notre place. Certes, citoyens de seconde zone pour certains mais nous n’avons pas de raison de nous humilier d’avantage pour vous rejoindre, nous y sommes déjà... Critiquer l’islam ? C’est le temps de l’auto critique qui est venu. J’en appelle aux grands esprits de l’islam à prendre leurs responsabilités car dans la bouche de ceux que j’entends, la critique n’est qu’insulte. Voyez ! monde minable des croyants où vous avez laissé descendre l’idée de dieu : dans l’arène moderne du monde, livré aux lions comme aux hyènes. Les Fatwa médiatiques son des tremplins pour médiocres.<br /> <br /> Ni fatwa, ni légion, je ne veux pas de décoration. Je sais mon chemin laborieux et loin des lumières artificielles. Je préfère le phosphore de l’effort qui éclaire mes pas dans les quartiers abandonnés par vos lois. Je peux mourir demain au nom de dieu ou de la république, j’ai déjà tellement compris, éprouvé, ressenti. Je me suis trop battu pour me laisser faire. Etre seul entre les deux feux ne me fait pas peur. Ne rien laisser, de mes lignes, n’a pas d’importance. Ce n’est pas une démarche orgueilleuse qui me pousse à me mettre à nu. Je suis un homme, un simple pécheur sans trophée devant sa Garance. Je ne compte pas le nombre de fois ou j’ai péché mais je regarde toujours la lune en espérant qu’il y ait quelque chose de réelle derrière le reflet qui se trouve sur l’eau.<br /> <br /> Redeker contre Ben Laden, l’un se prend pour Voltaire et l’autre pour le prophète. Le croisé et le Sarazin, moches comme des poux et teigneux comme des cancrelats. Il suffirait de laisser le temps faire son ouvrage. Ils finiront toujours par nourrir la terre mais il faut bien s’opposer pour la forme puisque nous n’aurons pas le droit de réponse comme de riposte. Tout le monde peut nous chier dessus dès que l’on moufte on est soit des harkis, soit de la cinquième colonne, notre silence n'est du qu'a leurs mépris. J’ai suffisamment de respect pour les harkis pour me sentir, à moitié, blessé. Dieu et la démocratie n’ont pas d’autres ennemis que les hommes et pourtant tous deux ont pris forme pour modeler les humanités. Tout est perversion et rien n’est à l’abri de notre proportion à staliniser ce qui était généreux.<br /> <br /> Bravo pour l'artilce dans libé je l'ai trouvé dans le train et me suis régalé.<br /> <br /> Amicalement<br /> Karim Bey SMAIL
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